Témoignage d’un couple qui a opté pour le planning familial
(Guinéeco.info)-Dans un entretien qu’ils ont a accordé à un reporter de votre journal économique en ligne, une femme de 45 ans et son mari polygame expliquent comment ils ont opté finalement pour le planning familial alors l’homme y était foncièrement opposé, lui qui est imam dans une mosquée de la banlieue de Conakry.
« Je suis mariée et mère et six enfants. Je suis la troisième épouse d’un leader religieux qui est le 3ème imam de notre mosquée. C’est un fervent wahhabite (Ndlr : adepte d’un islam rigoriste). J’ai choisi de pratiquer la planification familiale pour beaucoup de raisons. D’abord, je suis plus jeune que mes coépouses. Ensuite, pour les wahhabites, la femme se marie pour faire des enfants. Malgré tout, j’ai été voir une sage-femme, à l’insu de mon mari, pour qu’elle m’aide à pratiquer la planification familiale. A mon âge, je trouve que j’ai déjà fait beaucoup d’enfants. La sage-femme a accepté de m’aider», a confié Fatou Diallo* à un reporter de Guinéeco.info
« Quand je me suis décidée à en parler à mon mari, il m’a dit qu’il n’était pas d’accord. Cependant, il avait accepté que nous allions ensemble à l’hôpital», ajoute-t-elle. Face aux explications du personnel de santé sur les avantages de la planification familiale notamment pour la santé de la mère, de l’enfant et le bien-être au sein de la famille, l’époux aurait accepté, mais à une condition : que son épouse et lui rencontrent ensemble la sage- femme. « Il voulait, en fait, s’assurer que la sage-femme n’allait pas m’aider à ne plus faire d’enfants, confie Fatou.
Depuis lors, tout se passerait bien au sein du couple. « Chaque mois, mon époux m’accompagne au centre de santé du quartier où je prends mes produits contraceptifs. Je me sens bien surtout au plan moral parce que je ne me cache plus pour pratiquer la Planification familiale. Cela me permet également de faire en toute tranquillité mon commerce », témoigne cette femme de 45 ans et mère de six enfants.
Pour conclure, elle affirme avec fierté : « j’assure l’éducation de mes enfants parce que quand tu vis dans la famille d’un mari polygame si tu t’occupes de tes enfants, ils n’auront pas une bonne éducation et une bonne santé. Six enfants, c’est déjà trop ! »
« Les spécialistes de la santé m’ont ouvert les yeux »
« Je pensais que la planification familiale était un complot des blancs pour que les Africains ne fassent pas des enfants alors que les enfants c’est Dieu qui les donnent. C’est donc Lui seul qui peut les nourrir », confie, de son côté, El Hadj Bangoura*, le mari de Fatou. Cet imam polygame de haute banlieue de Conakry avoue, qu’avant, le mot planification familiale lui posait problème, parce qu’il pensait que c’est un système destiné à arrêter les naissances. Mais, les discussions qu’il a eues avec les spécialistes en Santé ont pu convaincu que la PF est plutôt un moyen d’espacer les naissances. « C’est à partir de ce moment que j’ai accepté que ma troisième femme pratique la planification familiale. C’est la plus jeune et elle fait un peu de commerce. D’ailleurs, c’est elle qui fait tout pour la famille, la grande famille », explique-t-il. Pour l’imam El Hadj Bangoura, « l’ignorance est un handicap pour un homme. Si j’avais eu les bonnes informations, je n’aillais pas m’opposer à ma femme qui, en pratiquant la PF, se souciait de sa santé, de celle des enfants. Avec l’aide des spécialistes j’ai compris que la vie de ma femme et de mes enfants en dépend. » Fort de cette expérience, ce religieux demande désormais aux fidèles musulmans «de penser à la santé de leurs femmes et à l’éducation des enfants ». Il les conseille d’encourager et d’aider leurs épouses à espacer les naissances
*Noms d’emprunt pour respecter l’anonymat du couple
Kadiatou Thierno Diallo