Ngbékro, cet autre « village modèle » ivoirien à double facette

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(Guinéeco.info)-Contrairement à Zatta, Ngbékro, le second village modèle ivoirien bénéficiaire du projet Saemaul Undong, cofinancé par la Banque africaine et la Corée du Sud et la Côte d’Ivoire, n’avait quasiment pas bénéficié d’infrastructures socio-économiques de base sous le régime du feu Houphouët Boigny, le premier président ivoirien.

Située à une douzaine de kilomètres de Yamoussoukro, le chef lieu de la région du Bélier, cette localité fait pourtant figure de bel exemple de réussite en matière de développement local actuellement. Le 5 mai 2018, des journalistes venus de 13 pays d’Afrique, des Etats-Unis d’Amérique et de la Corée du Sud, en compagnie de missionnaires de la BAD et l’Etat ivoirien ont débarqué à Nbgékro, pour vivre les mutations enregistrées par les populations locales grâce au projet Saemaul Undong village modèle.

Un village à double facette

La visite a commencé par une petite cérémonie de présentation au Foyer des jeunes de Ngbékro, fruit du projet Saemaul Undong village modèle d’inspiration coréenne. Nana Kouamé Yao, le chef de ce village baoulé, entouré de ses proches collaborateurs de la notabilité a souhaité la bienvenue aux hôtes.

N’Dri Kouassi Moise, le Président du Comité Saemaul Undong de Ngbékro explique que sa localité se subdivise en deux : l’ancien village, mal famé, avec ses maisons et cases en banco, et le nouveau village, bien loti, avec ses nouvelles infrastructures en dur, en partie obtenues grâce au projet Saemaul Undong. Il s’agit d’un centre de santé, d’une école primaire des trois classes, d’un logement pour enseignant et d’une retenue d’eau pour les exploitants agricoles. S’y ajoute un Fonds pour permettre aux villageois d’avoir accès aux crédits. Le tout pour un montant de 100 millions de Francs CFA.

Le Fonds à lui seul, souligne M. N’Dri, faisait une enveloppe de 11 millions de Francs CFA. Selon lui, 19 groupes de cinq personnes ont bénéficié de prêts de ce fonds, avec un taux de remboursement se situant à 65%. Ces prêts ont permis aux bénéficiaires d’investir dans des champs agricoles, des jardins maraichers, des boutiques, des commerces de poissons secs et de tissages.

Devant les missionnaires, Laurent, un jeune agriculteur du village a confié : « Avant, je faisais le maraicher sur une superficie de 500 m2, je récoltais à peine sept cartons de tomates. Avec l’arrivée du Projet Saemaul Undong, je bénéficié d’un crédit de 200.000 Francs CFA. Présentement, je fais ½ hectare. J’ai récolté 15 tonnes au mois d’août passé ».

L’homme n’entant s’arrêter en si bon chemin. Il veut étendre son domaine sur quatre hectares pour diversifier les cultures. Il déplore toutefois le faiblement rendement de son champs pendant la contre-saison et les effets pervers du changement climatique.

Trouvé dans ses installations, aménagées pour la circonstance à l’ombre de manguier du nouveau village, Kacou Kouassi, le président de l’Association des tisserands de Ngbékro a déclare que lui et son équipe de cinq personnes ont bénéficié d’un prêt du Projet Saemaul Undong leur permettant d’accroitre leurs revenus.

Dans le mois, explique, il leur arrive de tisser 10 pagnes dont l’unité est vendue entre 12.000 et 45.000 Francs CFA, selon la taille et la qualité. Ils ont une clientèle locale et des clients d’ailleurs qui commandent leurs produits.

Tout n’est pas rose

La mission a pu visiter l’école primaire de trois classes et le logement du maitre, une maisonnette de trois pièces. Elle n’a cependant pas visité le centre de santé construit dans le cadre de projet. L’infrastructure n’étant pas opérationnelle à cause du manque de personnel et d’équipement. Cet état de fait est d’ailleurs souligné dans le rapport d’évaluation du projet publié en mars 2017.

Ce rapport relève d’autres difficultés rencontrées dans la mise en œuvre du projet à Ngbékro. Il s’agit, entre autres, de sa courte durée (18 mois), du diagnostic sommaire effectuée par l’équipe technique coréenne, le problème de communication entre l’expert coréen et les autres parties prenantes du projet, du conflit foncier entre les populations locales et la faible mobilisation de celle-ci pendant les périodes de constructions des infrastructures.

Pendant la phase post-projet, le rapport note l’absence de plans de développement pluriannuel, les insuffisances du mécanisme d’octroi des prêts, le faible taux de remboursement des prêts, l’arrêt de certaines activités génératrices de revenus et celui des opérations mensuelles de salubrité et le mauvais fonctionnement du Comité Saemaul Undong village modèle de Ngbékro. Des difficultés que ce village partage largement avec celui de Zatta.

Bachir Sylla, envoyé spécial

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